La procédure de conciliation
La procédure de conciliation est l’une des deux procédures amiables régies par le droit des entreprises en difficulté, qui vise à prévenir une éventuelle cessation des paiements en permettant à une entreprise en difficulté financière de négocier avec ses créanciers sous la supervision d'un conciliateur, désigné par le Tribunal de Commerce.
Pendant la procédure de conciliation, l'entreprise et le conciliateur travaillent conjointement pour élaborer un accord amiable avec les créanciers, en cherchant des solutions pour rééchelonner les dettes, restructurer le passif. L'objectif est de parvenir à un accord qui permette la préservation de l'activité de l'entreprise et le règlement des créances, tout en évitant une procédure collective plus sévère comme la sauvegarde, le redressement judiciaire, ou la liquidation judiciaire.
La procédure de conciliation offre une période temporaire pendant laquelle l'entreprise bénéficie d'une protection contre les poursuites de la part de ses créanciers, afin de faciliter les négociations et de favoriser une solution concertée. Si un accord est atteint, il peut être homologué par le tribunal, offrant ainsi une certaine stabilité à l'entreprise pour se rétablir financièrement. Cependant, en cas d'échec des négociations, l'entreprise risque alors la cessation des paiements et son placement sous procédure collective.
Dirigeant d'une entreprise en difficulté : quand et pourquoi déclencher une conciliation ?
Dirigeant d'une entreprise en difficulté ? Si vous avez la lucidité pour percevoir que vous ne vous en sortirez pas tout seul et encore de l'énergie pour vous battre, c'est précisément le moment où vous devez déclencher une procédure de conciliation. Pas quand vous serez à genoux et que vos créanciers vous menaceront.
Les signaux d'alarme qui orientent vers la conciliation
Dégradation des ratios financiers critiques : quand votre ratio de liquidité générale passe sous 1, que votre ratio d'endettement dépasse 0,7 ou que votre capacité d'autofinancement devient négative. Ces indicateurs ne mentent jamais.
Tension sur le BFR : si vos délais de paiement clients s'allongent au-delà de 60 jours, que votre stock augmente anormalement ou que vous tirez sur vos délais fournisseurs, c'est le signe que votre cycle d'exploitation se grippe.
Problèmes de trésorerie récurrents : découverts bancaires fréquents, difficultés à honorer les échéances fiscales et sociales, négociations permanentes avec les fournisseurs. Quand vous passez votre temps à jongler avec les paiements, c'est un signe qu'il faut vite devancer le pire et réfléchir à une procédure amiable.
Les cas concrets où la conciliation s'impose
Perte de gros clients : si vous perdez 20% de votre CA d'un coup, ne faites pas l'autruche. La conciliation vous donnera 5 mois pour restructurer au lieu de subir une liquidation 3 mois plus tard.
Contentieux juridique majeur : procès coûteux, sinistre non couvert par l'assurance, litige commercial important. Mieux vaut anticiper que subir.
Changement réglementaire impactant : nouvelle norme qui rend votre produit obsolète, hausse brutale des coûts (énergie, matières premières), modification de la fiscalité.
Défaillance d'un partenaire stratégique : votre principal fournisseur fait faillite, un client important ne paie plus, votre sous-traitant clé disparaît.
La réalité des seuils critiques
Jusqu'au 45ème jour en état de cessation des paiements : vous pouvez encore choisir la conciliation. Au-delà, le tribunal de commerce vous refusera la possibilité de recourir à cette procédure.
Quand votre fonds de roulement devient négatif : si vos dettes à court terme dépassent votre actif circulant, vous êtes déjà dans le rouge.
Perte de plus de 50% des capitaux propres : c'est un signal d'alarme légal que votre commissaire aux comptes doit déclencher. Autant devancer.
Ce que personne n'ose vous dire
Les dirigeants qui attendent trop sont des inconscients qui condamnent leur entreprise, leurs salariés et leurs créanciers. La conciliation n'est pas un aveu de faiblesse, c'est l'acte d'un dirigeant responsable qui anticipe.
Vous avez encore de l'énergie ? Parfait, utilisez-la intelligemment plutôt que de rester dans le déni. La conciliation vous permettra de négocier en position de force relative plutôt qu'en situation de détresse absolue.
Différences entre conciliation et mandat ad hoc : guide pratique pour entrepreneurs
La confusion entre Conciliation et Mandat Ad Hoc est parfaitement compréhensible car ces deux procédures préventives partagent de nombreux points communs. Cependant, leurs différences sont cruciales pour un dirigeant d'une entreprise en difficulté, qui se doit de choisir la bonne stratégie.
Points communs fondamentaux
Les deux procédures sont amiables, confidentielles et préventives. Elles visent toutes deux à éviter la cessation de paiements ou les procédures collectives lourdes. Le dirigeant reste seul maître de sa gestion et peut mettre fin à la procédure à tout moment.
Les différences essentielles en termes simples
1. Condition de Cessation des Paiements - LA différence majeure
- Mandat ad hoc : interdit si votre entreprise est en cessation des paiements ;
- Conciliation : autorisée même si vous êtes en cessation des paiements depuis moins de 45 jours.
Cette différence est fondamentale : si vous ne pouvez plus payer vos dettes depuis 30 jours par exemple, seule la conciliation reste possible.
2. Durée et Flexibilité
- Mandat ad hoc : durée illimitée par la loi, généralement 3 mois renouvelables indéfiniment ;
- Conciliation : maximum 5 mois (4 mois + 1 mois de prolongation possible).
Le mandat ad hoc offre donc une flexibilité maximale pour des négociations longues et complexes.
3. Homologation et sécurité juridique
- Mandat ad hoc : l'accord reste un simple contrat de droit commun ;
- Conciliation : possibilité de faire constater ou homologuer l'accord par le tribunal, créant un privilège "new money" pour les nouveaux financements.
L'homologation en conciliation donne une protection juridique renforcée mais fait perdre la confidentialité.
4. Encadrement juridique
- Mandat ad hoc : très souple, régi uniquement par l'article L.611-3 du Code de commerce ;
- Conciliation : très encadré par les articles L.611-4 à L.611-17 du Code de commerce.
Statistiques récentes
En 2024, on compte 5 144 mandats ad hoc (+6,6% vs 2023) contre 3 629 conciliations (+8,4% vs 2023). Le mandat ad hoc reste donc plus populaire, probablement en raison de sa flexibilité.
Conseils pratiques pour choisir
Choisissez le MANDAT AD HOC si :
- Vous n'êtes pas en cessation des paiements ;
- Vous avez besoin de temps pour négocier (situation complexe) ;
- Vous privilégiez la discrétion absolue ;
- Vous voulez une approche "sur mesure".
Choisissez la CONCILIATION si :
- Vous êtes en cessation des paiements depuis moins de 45 jours ;
- Vous voulez une sécurité juridique renforcée ;
- Vous envisagez de nouveaux financements (privilège new money) ;
- Vous avez besoin d'une procédure plus structurée.
Exemples pratiques
Exemple mandat ad hoc : Une PME industrielle voit ses ventes chuter suite à une crise sectorielle. Le dirigeant anticipe et demande un mandat ad hoc avant la cessation des paiements. En 3 mois, des accords amiables sont trouvés avec les principaux créanciers.
Exemple conciliation : Une entreprise ne peut plus honorer ses échéances bancaires depuis 30 jours. Elle demande une conciliation, négocie un rééchelonnement de ses dettes et fait homologuer l'accord pour sécuriser de nouveaux financements.
Réforme à venir
Un groupe de travail installé en mai 2025 travaille sur la simplification du droit des entreprises en difficulté. Actuellement, il existe 13 procédures différentes, jugées trop complexes. Les conclusions sont attendues fin 2026 pour une réforme ambitieuse.
Conclusion directe
Si l'on souhaite arrêtez de se torturer l'esprit et d'aller à l'essentiel, il est tentant de simplifier comme suit. Si vous pouvez encore payer vos dettes : mandat ad hoc pour la flexibilité. Si vous ne pouvez plus payer depuis moins de 45 jours : conciliation pour la sécurité.
Dans les deux cas, agissez vite. Plus vous anticipez, meilleures sont vos chances de sauver votre entreprise. Et si vous hésitez encore, consultez un administrateur judiciaire ou un avocat spécialisé - c'est un investissement qui peut vous éviter la liquidation.
Sur Repreneurs.com, nous accompagnons régulièrement des entrepreneurs dans ces situations. N'hésitez pas à utiliser nos services pour être mis en relation avec les bons professionnels.